L'Eden cinéma - Marguerite Duras
Un bungalow colonial au mobilier banal, très usé, très pauvre. Autour, la plaine de Kam, dans le Haut-Cambodge. Cinq personnages. La mère s'assied sur un siège bas, les autres se groupent autour d'elle. Ils parlent de la mère. De son passé. De sa vie. De l'amour par elle provoqué. La mère restera immobile, lointaine, comme séparée de sa propre histoire. Tout ce qui pourrait être dit ici l'est directement par ses enfants Joseph et Suzanne, par le Caporal et Mr Jo qui l'ont aimée. La mère - objet du récit - n'aura jamais la parole sur elle-même, ni sur sa vie d'enseignante en Indochine, de pianiste à l'Eden Cinéma au temps du cinéma muet, ni sur son existence ingrate, ardue, d'après l'Eden Cinéma. «Elle était dure, la mère. Terrible. Invivable. Pleine d'amour. Mère de tous. Mère de tout. Criante. Hurlante. Dure...»
(1977) est une réécriture théâtrale du Barrage contre le Pacifique. Cette pièce a été représenté pour la première fois le 25 octobre 1977 par la Compagnie Renaud-Barrault au théâtre d'Orsay dans la mise en scène de Claude Régy. Le rôle de la mère a été interprété par Madeleine Renaud, Suzanne était Bulle Ogier et Michaël Lonsdale interprétait le rôle de Mr Jo. Les enfants nous livrent la vie de la mère. La mère parle peu c'est ses enfants qui parlent surtout. Un passage poignant celui de la lettre, la mère fait un procès contre le colonialisme, cette concession dont le terrain est incultivable, où de nombreux enfants meurent " Ici il meurt beaucoup d'enfants. Les terres que vous convoitez et que vous leur enlevez, les seules terres douces de la plaine, sont grouillantes de cadavres d'enfants." La pièce met en évidence les moments forts du Barrage. Dans l'Eden Cinéma, Marguerite Duras joue sur différent niveaux de narration. Suzanne joue, elle est présente sur scène mais aussi on entend sa voix dans la mise en scène de Claude Régy la voix de Suzanne n'est pas celle de Bulle Ogier mais celle de Catherine Sellers. Eden Cinéma et Barrage contre le Pacifique parlent de la mère, de son passé, de sa vie. " Elle était dure la mère. Terrible. Invivable. Pleine d'amour. Mère de tous. Mère de tout. Criante. Hurlante. Dure ..." L'écriture de Marguerite Duras est sans émotion, sans compassion, une écriture assez distante mais musicale très rythmé.
C'est agréable de lire la prose d'un très grand écrivain.